Je veux poser un lapin à ce policier

Une enquête pour diffamation a été ouverte à mon encontre pour avoir manifesté mon courroux contre un commerçant qui propose de la viande de poussin, ce que je trouve cruel. L’affaire a été confiée à un agent de police qui était déjà intervenu deux ans plus tôt dans une procédure visant mon fils et moi, pour avoir mangé quelques œufs en chocolat dans une grande surface sans les payer… Cette histoire n’a rien à voir avec celle qui me préoccupe actuellement et heureusement, la procédure avait été classée. Cependant, le policier avait eu certains a priori contre moi et les idées que je défends, alors je me demande s’il est possible de l’écarter de cette nouvelle enquête.

J., Meyrin

La récusation d’un agent de police est envisageable, mais les chances de succès sont plutôt minces.

En droit suisse, les policiers font partie des autorités pénales (art. 12 let. a du Code de procédure pénale), et ils sont soumis aux règles sur la récusation qui permettent d’écarter un membre d’une autorité dans le cadre d’une procédure pour son manque d’impartialité, par exemple lorsque la personne concernée a un intérêt personnel dans l’affaire, des liens familiaux ou d’autres liens particuliers, ou encore agit sous différentes casquettes dans la même cause.

Toutefois, comme le Tribunal fédéral l’a expliqué dans sa jurisprudence, les exigences d’impartialité attendues d’un agent de police sont moindres en comparaison de celles qui s’appliquent aux juges ou aux procureurs. Concrètement, seules des erreurs graves et répétées ou des comportements manifestement tendancieux permettent d’admettre une apparence de partialité suffisante pour écarter un policier d’une enquête.

En pratique, des comportements comme le refus d’enregistrer une plainte, une présentation unilatérale des faits dans un rapport, l’absence de recherche de témoins ou encore la négligence dans la saisie d’une preuve peuvent être invoqués, mais ils ne suffisent en général pas, à eux seuls, à démontrer un défaut d’impartialité. Il est en outre nécessaire de prouver que les agissements inacceptables reprochés au policier sont en lien direct avec l’enquête actuelle. Enfin, une récusation ne saurait être fondée uniquement sur de simples soupçons ou ressentis subjectifs.

Dans la situation que vous décrivez, le fait qu’un agent de police ait déjà traité une autre affaire vous concernant, même si celle-ci a été classée, ne suffit pas en soi à justifier sa récusation. Si vous décidez de saisir le Ministère public de cette question, vous devrez démontrer, de manière concrète et objectivement vérifiable, que ce policier n’est pas en mesure de conduire une enquête impartiale. Un simple souvenir d’échanges tendus avec lui ou un sentiment d’injustice ne suffira pas. À défaut de soigneusement motiver votre requête par des faits précis et étayés, il est fort probable qu’elle soit rejetée.

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