On ne peut pas notifier des poursuites à n’importe qui!

Je suis parti en voyage pendant quelques mois et à mon retour j’ai eu la surprise de recevoir un «avis de saisie» de la part de l’Office des poursuites. Ils m’ont expliqué qu’une poursuite avait été demandée contre moi et qu’un commandement de payer avait été remis à l’ami qui gardait mon appartement et nourrissait mon chat pendant mon absence! Est-ce admissible? Comment dois-je me défendre?

Robert, Genève

Vous avez raison de vous interroger, car la notification d’un commandement de payer à une autre personne que le débiteur n’est valable que dans des cas très restreints. L’article 64 alinéa 1 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP) prévoit en effet qu’un commandement de payer doit être remis en mains propres au débiteur ou, en cas d’absence, à une personne adulte de son ménage ou à un employé. Cette règle vise à garantir que le poursuivi ait une chance réelle de prendre connaissance de l’acte. Le Tribunal fédéral a précisé que cette remise ne peut pas être faite à n’importe qui: il ne suffit pas que la personne soit simplement présente dans le logement ou l’immeuble; encore faut-il qu’elle fasse partie du ménage ou qu’elle agisse dans un cadre professionnel.

Dans votre cas, l’ami qui gardait l’appartement ne semble ni être un employé, ni un membre de votre ménage. Il n’était donc pas autorisé à recevoir valablement un commandement de payer en votre nom. La notification à cette personne est ainsi entachée d’irrégularité. Ce vice de procédure peut entraîner la nullité de la notification – et donc de toute la poursuite qui en découle – si vous n’en avez effectivement pas eu connaissance à temps pour réagir.

La jurisprudence admet cependant qu’un acte mal notifié puisse produire ses effets si le débiteur a pu en prendre connaissance malgré la notification viciée. Dans votre cas, si vous avez découvert le commandement de payer à votre retour de voyage, par exemple en le trouvant dans votre pile de courriers ou en recevant une copie suite à des démarches auprès de l’Office des poursuites, il faut impérativement y former opposition auprès de l’Office qui l’a émis et porter en même temps plainte auprès de l’Autorité de surveillance en matière de poursuites et faillites pour notification irrégulière, dans les deux cas dans un délai de dix jours depuis que vous avez pris connaissance du commandement de payer. À défaut, il sera considéré que vous avez renoncé à faire valoir vos droits.

En résumé, la remise du commandement de payer à votre ami ne semble pas valable selon la loi et la jurisprudence. En découvrant qu’une procédure de poursuite est ouverte contre vous, il vous faut immédiatement consulter l’Office des poursuites et demander une copie du commandement de payer si vous ne l’avez pas en votre possession, puis entreprendre les démarches indiquées ci-dessus.

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