Voisinage malodorant : quelles voies de droit ?

 

"La ventilation de la cuisine de mes voisins donne directement sous mon couvert qui est en partie fermé. A cet endroit se trouvent ma porte d’entrée et ma place de parking. Au quotidien, on doit supporter les odeurs et cela devient vraiment désagréable. Je vous sollicite donc pour savoir ce que la loi me permet de faire."

Thomas, Chêne-Bougeries

 

Les mauvaises odeurs peuvent effectivement mettre les rapports de voisinage à rude épreuve lorsque le dialogue ne permet pas de trouver une solution à ce problème incommodant.

Si votre voisin est propriétaire de son logement, sachez qu’il est tenu, dans l’exercice de son droit, de s’abstenir de tout excès à votre détriment. L’art. 684 du Code civil prescrit en effet que sont interdits en particulier la pollution de l’air, les mauvaises odeurs, les bruit, les vibrations, le rayonnement ainsi que la privation de lumière ou d’ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d’après l’usage local, la situation et la nature des immeubles. Celui qui est menacé ou atteint d’un dommage parce qu’un propriétaire excède son droit peut saisir le juge pour qu’il soit condamné à prendre des mesures en vue d’écarter un danger, à remettre les choses en état ou encore à verser des dommages-intérêts.

Vous pouvez faire valoir ces droits non seulement si vous êtes vous-même propriétaire de votre appartement ou villa, mais également si vous êtes seulement titulaire d’un droit réel restreint (usufruitier, superficiaire) ou titulaire d’un droit personnel (par exemple si vous êtes locataire).

Cela étant, les voisins doivent tout de même faire preuve de tolérance et accepter certaines nuisances, la question principale étant de savoir si les mauvaises odeurs dont vous vous plaignez excèdent ou non les limites du supportable. Selon la jurisprudence, pour distinguer les immissions qui doivent être tolérées de celles qui sont excessives, il faut se baser sur des critères objectifs. Le juge se place ainsi du point de vue d’une personne normale et fait abstraction des doléances d’un hypersensible comme de l’absence de réaction d’un indolent. Il dispose donc d’un large pouvoir d’appréciation. A titre d’exemple, le Tribunal fédéral a considéré comme des émissions excessives l’odeur et le bruit à proximité d’une porcherie ou d’un abattoir situé au milieu d’un village, ou encore ceux d’une rôtisserie sise dans un quartier destiné à l’habitation.

Si ces mauvaises odeurs de cuisine ne se font sentir que sous votre couvert, soit à l’extérieur de votre logement, il sera peut-être plus difficile de démontrer que ces nuisances excèdent la limite du tolérable. Il en ira différemment si elles sont très fortes, très fréquentes et se propagent également à l’intérieur de votre habitation.

A relever enfin que si votre voisin n’est lui-même pas propriétaire des lieux, vous pourrez également agir contre lui, selon les mêmes principes, sur la base des règles du Code civil qui protègent contre les troubles de la possession, conformément à l’art. 928 CC.

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