Je suis attaqué deux fois avec la même procédure
Une connaissance m’a octroyé un prêt il y a un an, que je devais théoriquement lui rembourser au bout de six mois. Ce prêt fait l’objet d’un contrat écrit signé entre nous, mais nous avons oralement convenu autre chose. Une mésentente est née et comme je ne l’ai pas remboursé, il a déposé une réquisition de poursuite contre moi, à laquelle j’ai fait opposition. Mon créancier a requis la mainlevée de cette opposition mais le juge l’a débouté car il n’a pas produit le fameux contrat signé… Je viens de recevoir une nouvelle convocation en justice car il a déposé la même demande en produisant cette fois le contrat! Est-ce qu’il a le droit de procéder ainsi alors que nous avons déjà reçu un jugement à ce sujet?
A.
Oui, votre créancier a le droit de redéposer une requête de mainlevée dans la même poursuite.
En droit suisse, la procédure de mainlevée d’opposition permet à un créancier de faire lever l’opposition formée à un commandement de payer, à condition de produire un titre de créance valable. Cette procédure, régie par les articles 82 et suivants de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), constitue un simple incident de poursuite. Elle ne tranche pas le fond du litige mais vise uniquement à permettre la continuation de la procédure de recouvrement. Le juge saisi n’analyse à cet effet que les documents qui lui sont soumis par les parties.
C’est pourquoi, contrairement à une décision judiciaire statuant de manière complète sur les prétentions des parties à l’issue d’enquêtes approfondies, le rejet d’une première requête de mainlevée ne signifie pas que le créancier a perdu son droit à la créance. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral (notamment l’ATF 140 III 456), un tel rejet n’a pas l’autorité de la chose jugée quant à l’existence même de la dette.
Ainsi, lorsque la requête initiale échoue pour des raisons de forme ou de preuve – par exemple en raison de l’absence du contrat signé –, le poursuivant conserve la possibilité de revenir avec un nouveau dossier complet. Il peut donc requérir à nouveau la mainlevée, cette fois avec le contrat à l’appui, pour autant que la poursuite en cours soit encore valable.
Dans votre situation, votre créancier a simplement corrigé une erreur initiale et fait valoir à nouveau son droit avec les pièces adéquates. La loi lui en donne la possibilité, sans qu’il ait à engager une nouvelle poursuite. En somme, en matière de poursuite, un refus de mainlevée n’est pas une fin, mais parfois juste un contretemps administratif à surmonter avec un peu de rigueur.