Le 3e sexe existe-t-il juridiquement ?
Une jeune fille de mon entourage m’a récemment expliqué qu’elle est
« non binaire », c’est-à-dire si j’ai bien compris qu’elle ne se sent ni femme, ni homme. Elle m’a expliqué que dans certains pays européens, il est possible d’effacer la mention du sexe sur les papiers d’identité ou de faire inscrire un « sexe neutre ». Je trouve cela très étonnant : où en est-on en Suisse par rapport à ces questions ?
F, Genève
Votre question est d’actualité, puisque le Conseil fédéral suisse y a répondu il y a seulement quelques mois, dans un rapport du mois de décembre 2022. En substance, il a considéré qu’actuellement, les conditions sociales pour l’introduction d’un troisième sexe ou l’abandon général de l’inscription du sexe dans les registres d’état civil suisse ne sont pas réunies.
Notre gouvernement a relevé qu’une telle modification nécessiterait de nombreuses modifications dans la Constitution, les lois fédérales, mais aussi dans les législations cantonales et communales, puisque de nombreuses normes font actuellement référence au sexe féminin et/ou au sexe masculin (on parle effectivement de système juridique basé sur la binarité des sexes).
A titre d’exemple, on peut citer l’un des premiers articles de la Constitution qui énonce que l’homme et la femme sont égaux en droit (art. 8), ou encore l’obligation de service militaire qui ne s’applique qu’aux hommes (art. 59).
En l’état, en Suisse, lorsqu’un enfant naît, il doit se voir attribuer le sexe féminin ou masculin, en fonction des constatations médicales, ce qui doit obligatoirement figurer dans le registre d’état civil.
Par ailleurs, si le Code civil suisse a été modifié et permet, depuis début 2022, à toute personne qui a la conviction intime et constante de ne pas appartenir au sexe inscrit dans le registre de l’état civil de faire modifier cette inscription, par une « simple » déclaration à l’officier de l’état civil (autrement dit sans plus passer par une procédure judiciaire), le choix demeure limité aux deux catégories « masculin » et « féminin ».
Il n’est donc pas possible - comme en Allemagne par exemple - d’inscrire la naissance sans mention de sexe ou de supprimer cette mention postérieurement dans les registres officiels.
Le Conseil fédéral a cependant reconnu que la binarité des sexes peut poser problème aux personnes qui ne s’identifient pas à l’une des deux catégories traditionnellement connues, de sorte qu’il n’est pas exclu que cette question soit à nouveau prochainement abordée dans les débats parlementaires..
En cette semaine qui a célébré la Journée internationale des femmes, nous nous permettons donc pour l’heure d’adresser nos meilleurs vœux aux lectrices et lecteurs qui se sentent de ce sexe, que celui-ci soit considéré fort ou faible selon les revendications de chacun/e, et en attendant la Journée internationale des hommes au mois de novembre prochain, espérons que tout le monde se tende la main, comme dans la chanson « 3e sexe » !